Explication linéaire: Le papillon


Le papillon

Francis PONGE


Problématique 

·               Montrez que le regard du poète métamorphose la nature, et dégagez la signification de ces transformations.

Introduction

·               Francis Ponge est un poète français du XXe siècle. Son indépendance à l'égard de tout mouvement littéraire et sa liberté vis-à-vis des codes de la poésie lui valent d'être incompris en son temps, mais il est aujourd'hui reconnu comme l'un des poètes majeurs du siècle dernier.

·               Francis Ponge naît à Montpellier le 27 mars 1899 et décédé au Bar-sur-Loup, Alpes-Maritimes, le 6 août 1988. Après son baccalauréat, il prépare des études de lettres et de philosophie, mais échoue au concours d'entrée de l'École normale supérieure en 1919.

·               Son ouvrage majeur, "Le Parti pris des choses", est publié chez Gallimard en 1942. Ce sont des définitions d'objets du quotidien, sous forme de courts textes poétiques jouant avec les mots, que le poète considère comme une matière à travailler.

·               Dans son poème «  Le papillon » extrait de son recueil «  Le parti Pris des Choses », il évoque la métamorphose de la chenille en papillon dans le but de créer un objet littéraire : un poème en prose. En étudiant ce texte, nous montrons que le regard du poète métamorphose la nature, et dégageons la signification de ces transformations.

Le premier paragraphe

·               Tout d'abord, on remarque que le papillon n'est pas mentionné directement dans le poème, il y a un effet d'attente qui est créé.

·               Le premier paragraphe représente la naissance du papillon. Pour Ponge, le papillon peut être un symbole de fierté. Au vers 3 le papillon, enfin libéré de sa chrysalide, prend son envol : '' d'où les papillons tout à coup prennent leur envol ‘‘.

·               Le long tiret '' - '' peut correspondre au corps du papillon quand il était encore une pauvre chenille ou alors peut représenter la tige d'une fleur.

·               Le premier paragraphe établit un rapprochement entre l’éclosion des fleurs et l’envol des papillons ; cette idée est introduite par le connecteur temporel « Lorsque » l.1 + évocation du « sucre élaboré dans les tiges » au fond des fleurs. On relève à cet instant une comparaison  négative « comme des tasses mal lavées » l.2.

·               Le premier mot du texte est une conjonction de subordination « Lorsque » et qui met en avant la proposition subordonnée temporelle.

·               3 verbes au présent dans la même phrase qui constitue tout le 1er paragraphe, soulignent des événements, des changements : « surgit » (l. 1) (action soudaine, rapide, renforcée par « tout à coup » l. 3), « se produit » (l. 2) & « prennent ».

Deuxième paragraphe

·               Le 2ème paragraphe est en opposition au 1er, comme le met clairement en évidence la conjonction « mais » (l. 4) placée en tête de celui-ci (même manière de procéder qu'au 1er paragraphe).

·               Le deuxième paragraphe rappelle l'état qu'a dû endurer le papillon avant de voler. Il était auparavant L. 4 '' chenille eut la tête aveuglée '' et des éléments descriptifs précis sont donnés au lecteur en s'arrêtant sur des parties du corps de la créature. Puis L.5 il est enfin libéré et ses '' ailes symétriques flambèrent ‘‘. Cette expression fait penser à la bougie quand Ponge parle de '' papillons miteux ''

 

·               Dans ce même paragraphe, le pluriel va se transformer en singulier. Cependant, l’auteur passe par une étape en arrière dans le temps, on le voit notamment avec l’utilisation des passés simples de l’indicatif « eut » et « flambèrent » qui repoussent dans un passé court la naissance du papillon. Ce deuxième paragraphe déstructure le discours narratif instauré par le premier paragraphe avec un « flash-back ».

Troisième paragraphe

·               Le troisième paragraphe commence par un connecteur temporel mis en valeur en tête de ce paragraphe et qui rime en partie avec « Lorsque » pour décrire le déroulement du récit.

·               Ponge illustre que le déplacement du papillon est libre et chaotique : « erratique » 

Quatrième paragraphe

·               Le 4ème  paragraphe, le plus long, va raconter cette route hasardeuse et dont même le passé n’est pas particulièrement positif. Son histoire est d’être un simple transporteur pour « se venger » de son passé. Ainsi l’histoire n’est pas celle d’un « papillon » porteur de bonnes nouvelles, mais de la transmission de « guenille atrophiée ». Le lecteur est très éloigné de l’image traditionnelle du papillon.

·               La maigreur citée au deuxième paragraphe est reprise par la métaphore de l'allumette (l. 8), comme les couleurs éclatantes sont soulignées plusieurs fois : « flambèrent » (l. 5), « sa flamme » (l. 8).

·               Dans ce paragraphe, le papillon désigné par le pronom « il » est, à plusieurs reprises, mis en relation avec les fleurs et renforcé par le verbe « pose » qui indique un contact physique.

·               "Et d'ailleurs, il arrive trop tard et ne peut que constater les fleurs écloses. N'importe : se conduisant en lampiste, il vérifie la provision d'huile de chacune."

·               On peut parler d'une image en contradiction avec la réalité : au lieu d'absorber un liquide pour se nourrir, le papillon vérifie que les fleurs – devenues des lampes à huile ! – sont bien remplies et donc capables d'éclairer :

·               Le papillon est donc au service du feu et de la lumière. Les fleurs lumineuses doivent briller pour tout le monde. Il n'est plus question de nectar (mentionné comme du "sucre élaboré dans les tiges [qui] surgit au fond des fleurs, comme des tasses mal lavées") ; les "fleurs écloses" semblent purifiées, elles deviennent le symbole du printemps et de la vie ; la notation péjorative du début du texte (elles n'étaient que "des tasses mal lavées") a complètement disparu, et la beauté triomphe.

·               Là encore, nous constatons une progression vers la pureté et la beauté.

·               Le papillon emporte son cocon ("la guenille atrophiée" est une formule péjorative ; guenille = de vieux vêtement ; atrophiée : affaiblie – puisque le cocon est maintenant vide), et le "pose au sommet des fleurs" pour se venger de "sa longue humiliation" de chenille. Il y aurait ainsi chez le papillon une volonté de dégradation de la fleur.

·               Traditionnellement, le papillon ajoute sa beauté propre à celle des fleurs ; Ponge s'écarte des clichés, et imagine une sorte de rivalité entre le papillon et les fleurs.

·               "Allumette volante, sa flamme n'est pas contagieuse."

·               Le corps du papillon terminé par une tête sphérique, orné d'ailes aux couleurs éclatantes, a fourni à Francis Ponge le point de départ d'une métaphore : l'insecte devient sous sa plume une "allumette volante" ; le battement des ailes du papillon peut d'ailleurs se rapprocher du vacillement d'une flamme dans un courant d'air.

·               La métaphore se prolonge avec la formule "sa flamme n'est pas contagieuse" ; on comprend trop facilement que ce n'est pas le papillon qui fait éclore les fleurs. Si la "flamme" représente la beauté des ailes, Ponge suggère peut-être que cette beauté, en mouvement, est supérieure à celle des fleurs immobiles.

Cinquième paragraphe

·               Enfin, dans le dernier paragraphe, le papillon devient, par le biais d'une métaphore, un « pétale » (l. 13). Les deux éléments fusionnent en un seul en cette fin de poème.

·               Le poème nous incite à développer une réflexion sur la nature, notamment grâce à la métaphore du "voilier" qui conclut le poème.

·               Le papillon qui volète au gré du vent est métamorphosé en "voilier" naviguant dans les airs, poussé par le vent. Il est même "maltraité" par ce vent qui le transforme en "pétale superfétatoire", et c'est ici que réside l'originalité de la vision de Ponge.

·               Au lieu de reprendre un lieu commun poétique, en peignant une nature sereine, belle et harmonieuse, Ponge décrit cette dernière comme hostile, puisqu'elle maltraite le papillon, aussi fragile qu'un "pétale" de fleur.

C.C

·               Cette longue observation de l’organisation métaphorique du texte nous montre combien l’écriture poétique de Ponge est particulière. Certes, il se sert principalement des observations scientifiques : la reproduction hasardeuse des fleurs, la transformation de la chenille en papillon mais il ne les enferme pas dans un simple discours d’observation.

·               La fragilité du papillon est aussi évoquée dans un autre poème du recueil, « La bougie » ; les papillons de nuit attirés par la lumière de la bougie prennent le risque de se brûler les ailes.

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